En librairie : De la technocratie (la classe puissante à l’ère technologique). Voir ici

C’est une révélation que nous avons eue au fond d’une bouquinerie. Un manifeste traduit en 1968, chez Pauvert, l’éditeur le plus frondeur de son temps. Ce manifeste, Les deux cultures et la révolution scientifique, publié neuf ans plus tôt par Charles Percy Snow, aussi mauvais romancier que scientifique, avait connu un vif retentissement dans l’intelligentsia anglo-saxonne, et provoqué d’âpres réponses.

Snow s’y plaignait que les bienfaiteurs de l’humanité, les scientifiques, ne soient pas reconnus à la mesure des progrès économiques et sociaux dus à leur génie. Il s’en prenait surtout aux intellectuels, « naturellement luddites », et aux tenants des humanités (qualifiées de « culture traditionnelle »), coupables de snober les sciences, et de ne pas répandre dans le public la nécessaire attitude de confiance et de bienvenue aux innovations technologiques.

Cependant, il plaçait de grands espoirs dans l’activité d’une autre culture, celle des sciences humaines et sociales, pour vaincre les vieilles humanités et communiquer au public toute la ferveur souhaitable envers le nucléaire, l’informatique, l’industrie chimique, etc.

Soixante ans plus tard, c’est chose faite et nous assistons à l’essor d’un monstre oxymorique, dénommé humanités numériques. Ce que désigne cette absurdité, c’est une comptabilité statistique, un inventaire et une numérisation des données d’une œuvre ou d’un fait social, afin que des logiciels patiemment améliorés nous en livrent le sens et les ressorts. Au fond, ces pauvres gens se figurent qu’on peut savoir en la scannant, ce qui se passe dans la tête de Léonard de Vinci. Il s’agit toujours de traiter les humains et les faits humains comme des choses.

Nous avons donc, sans l’aide d’aucun logiciel, ni d’aucune intelligence artificielle, procédé au résumé et à l’analyse du livre de Snow et de ses successeurs cybernétiques. Attention : la stupidité intellectuelle de ces entreprises n’empêche nullement, hélas, des effets concrets dans le monde réel, et notamment dans le traitement des réfractaires.

(Pour lire le texte, ouvrir le document ci-dessous.)

Lire aussi :
Rendez-vous notre objet d’aliénation favori ! ou pourquoi la technologie est le problème