Voici un reportage exclusif de notre envoyé spécial à Smart City, Tom 2.0.

Ce reportage présente une double nouveauté. C’est le premier jamais réalisé par un avatar et le premier également sur la mythique Smart City, actuellement en construction entre Doha et Songdo. Nous ne doutons pas de voir cette double nouveauté suivie de multiples répliques, à plus ou moins bref délai, suivant les lois de l’imitation médiatique.

L’automatisation générale des emplois et métiers s’étend désormais aux journalistes, après avoir éliminé soudeurs, poinçonneurs, caissières et guichetiers. Normal. Tant qu’on nous réduira à l’état de robots, les robots nous réduiront à néant. Le journalisme était devenu depuis trop longtemps une fonction machinale, facile à décomposer en tâches successives à la portée de n’importe quel logiciel ou « smart rédacteur », pour échapper davantage à cette modernisation des modes de production des contenus.

Inutile de s’ affliger ou de verser dans les jérémiades nostalgiques et réactionnaires, la plupart des lecteurs ayant eux-même embrassé avec enthousiasme l’idéal numérique et n’aspirant à rien d’autre qu’à la perfection mécanique.

Ils se régalaient ainsi, depuis des décennies, des mêmes articles sur les mêmes sujets, rédigés suivant les mêmes angles et les mêmes formulations ; et ils auraient été si perturbés qu’on y change quoi que ce soit, qu’ils auraient cessé d’acheter leurs supports habituels. Il est d’ailleurs question de remplacer les lecteurs par des liseuses électroniques qui raconteront le contenu du journal à leurs propriétaires.

Ce psittacisme rassurant affectait particulièrement le reportage. Chaque reporter avant de s’envoler pour Shanghaï, Dubaï ou la Silicon Valley, prenait soin de copier les lieux communs déjà accumulés par ses confrères sur le même sujet, et de valider avec son rédacteur en chef ce qu’il était censé rapporter de son bref aller-retour sur place. Le reportage ne servait en fait qu’à illustrer le pré-script, à lui donner la caution du « vécu » et du « réel ». L’imprévu et l’improbable étant proscrits au nom de la « crédibilité ». Et tant pis pour la théorie qui mesure l’intérêt d’une information à son éruptive nouveauté. Au mieux, le talent du reporter était de savoir répéter ses prédécesseurs, en ajoutant ses tics personnels et en montant des détails en épingle à l’usage de ses successeurs. Il s’agissait en somme de se distinguer dans la redondance.

Nous avons donc décidé de raccourcir les circuits de production journalistique et d’éliminer l’inutile et coûteux pseudo-reportage sur place. Tout est sur le réseau. Il suffit d’y rôder pour trouver les images, les témoignages, les personnages, les rencontrer, les interroger et en rapporter bien plus d’informations que d’un séjour en hôtel, entre deux avions.

D’ailleurs la vie est un songe. La présence réelle (In Real Life), une simple image virtuelle générée par le Grand Ordinateur et nous sommes de l’étoffe dont sont faits les rêves. Rien qu’une combinaison d’algorithmes, de l’information qui circule.

(Pour lire le reportage de Tom 2.0, cliquer sur l’icône ci-dessous.)

Lire aussi :
 Le site de Tom 2.0 : http://hors-sol.herbesfolles.org/

 Les vrais "fascistes" de notre temps - Le Corbusier et les architectes urbanistes
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