Pour en finir avec Crolles 2

mardi 3 avril 2007 par Basile Pévin

Quel rapport entre Airbus, Alcatel-Lucent et STMicroelectronics ? Voici trois méga-entreprises de haute technologie aussi gourmandes en subventions que ravageuses pour l’environnement, fabricants de nuisances écologiques et sociales, et qui malgré tout licencient et/ou déménagent à pleines charretées. Le vice n’est pas récompensé. Cela n’empêche pourtant pas la gauche industrielle, Besancenot , Buffet, Laguillier, de réclamer à l’unisson des syndicats de nouvelles aides d’Etat pour les fabricants de puces, de téléphones portables et de gros porteurs. L’emploi, c’est bon pour la flexibilité.

Prenez STMicroelectronics, à Crolles 2 (voir pièce jointe), vous souvenez-vous de l’inauguration par Chirac en février 2003 ? Quand, de Vallini à Destot, tous nos élus se gargarisaient du "plus gros investissement industriel en France depuis dix ans" ?
Janvier 2007. Coup de tonnerre sur la cuvette. NXP et Freescale annoncent leur départ de l’Alliance-Crolles 2. Le modèle de la "réussite grenobloise" est ridiculisé. STMicroelectronics, dernier des trois partenaires en place, programme la délocalisation de sa Recherche & Développement.

Leurs emplois menacés, les salariés de l’Alliance protestent contre cette "compétitivité" qu’ils applaudissaient tant qu’ils y gagnaient, qu’"on" doublait les Américains et les Asiatiques, fut-ce au prix d’un désastre écologique et social. La main-d’œuvre de la "Silicon Valley française" méprise les protestations contre le saccage de la vallée, le pillage de l’eau et des sols, la pollution, l’absurdité d’une vie sous monitoring électronique, au prétexte des "emplois créés" et du "progrès technologique".

Aujourd’hui ils découvrent qu’après l’environnement et le cadre de vie, ils ne constituaient eux aussi qu’une variable d’ajustement pour leur direction, un chiffre dans la colonne "input". Qu’est-ce qu’ils s’imaginaient ? Et de quoi se plaignent-ils ? Quand nous défendons l’environnement contre leur employeur, c’est eux aussi, leur vie, que nous défendons. On n’entendait guère leurs protestations quand leurs collègues des petites boites low tech de la vallée étaient vidés (papeteries, fonderies, etc). STMicro pompe les hommes comme elle pompe l’eau. Quand les hommes et l’eau sont épuisés, on va ailleurs.

Et maintenant, un dilemme cornélien pour les syndicalistes : vendredi 13 avril les salariés de la grande distribution et des autoroutes Escota protestaient contre l’automatisation de leurs caisses, c’est-à-dire contre l’invasion de ces puces électroniques, fierté des employés de ST.

La mise en place de caisses automatiques dans les supermarchés français menace 200 000 emplois - les bornes remplaçant les caissières, le client scannant lui-même ses articles. La CFDT pointe la "vraie menace" : les puces RFID qui remplaceront bientôt les codes-barres, les caissières et les caisses elles-mêmes (cf "RFID la police totale", Pièces et Main d’œuvre, mars 2006). Les RFID, qui sont l’un des grands débouchés de l’industrie des semi-conducteurs.

Caissière, c’est un sale boulot, mais pas plus sale que pingouin en salle blanche chez STMicro.
Qui les syndicats défendront-ils ?

On verra dans l’article ci-joint de Basile Pévin que Crolles 2 est aussi bien un désastre écologique et social qu’économique. Sa fin serait donc tout sauf une mauvaise nouvelle.

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