Nous devons une autocritique et des excuses à nos lecteurs : nous avons commis un crime de lèse-prolétariat. Dans deux libelles récents sur la défense du cancer français (ici et ici), nous nous sommes permis, avec notre arrogance typique d’intellectuels et de déserteurs coupés des masses, d’attaquer l’emploi, la croissance et le PVC, un magnifique produit universellement répandu dans les objets de notre vie quotidienne ; et si précieux pour les salariés, les consommateurs, leurs familles – et bien sûr l’industrie du cancer.
Heureusement, la classe ouvrière, comme toutes les catégories opprimées, a des ventriloques, des souteneurs qui savent la faire parler et parler en son nom : hauts-parleurs du Front de Gauche, hauts-parleurs médiatiques, stratèges du « Retour à l’usine » et de « L’industrie, socle de la puissance » (Le Monde diplomatique, mars 2012). Leur discours ? Les ouvriers n’ont pas le choix, ce sont des victimes, en particulier du chômage de masse et de la précarité, des irresponsables, il est indécent de leur parler des nuisances de leur activité salariée sans leur proposer d’alternative. Les souteneurs font leur pelote sur le dos de leurs protégés et de leur cause qu’ils prostituent, c’est la règle.
Parce que nous voulons conserver une autre idée de la classe ouvrière, parce que nous croyons ses membres doués de libre-arbitre, de dignité, de volonté (qu’ils savent manifester pour défendre les pires secteurs d’activité), de capacité de révolte et d’aspiration à l’autonomie, nous leur faisons crédit d’une responsabilité qu’ils doivent assumer. Beaucoup ont déserté la boîte, plutôt que de collaborer. Nous nous reconnaissons dans ceux-là, dans cette désertion à la fois morale et politique. Il ne manque que le nombre pour que cela crève les yeux des plus aveugles souteneurs.
Dans ces pages, nous rendons au PVC et à ses apologistes tout ce qui leur appartient. À vrai dire, nous n’avons pas cessé de le faire depuis 2002 – date du transfert du phosgène de Toulouse à Grenoble, après l’explosion d’AZF (lire ici). Dans un fielleux pamphlet de 2004, consacré à la fermeture de l’usine Atofina de Brignoud (Du crabe dans l’Isère), nous disions déjà : « quoi qu’on fasse avec du PVC, ça ne vaut pas le foie d’un homme » (lire ici). On voit que nous sommes endurcis dans la calomnie, jusqu’à nos plus récentes dénonciations des nanotubes de carbone – produits par Arkema – qui préparent la prochaine vague de cancers. Logique, puisque le cancer et les maladies neurodégénératives sont le produit de la société industrielle que nous combattons, entre autres pour ce motif. (...)
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