Depuis Virgile et Les Géorgiques, Tarente était un lieu commun des poètes. Un jardin au bord de mer. Des fruits, des fleurs et des dauphins. En 60 ans, la société industrielle a fait de cette ville des Pouilles un enfer : la plus grande aciérie d’Europe, l’Ilva, une base de l’OTAN, une banlieue mortifère. 70 000 morts prématurées en vingt ans - du cancer, surtout. la poussière d’acier de l’Ilva, qui sature la ville.
TomJo, rédacteur à La Brique, un journal lillois, en a pourtant ramené un reportage qui n’est pas complètement lugubre ni désolé.
Il y a une différence entre les ouvriers de l’Ilva, à Tarente, et ceux d’Arcelor-Mittal, à Florange, en Lorraine. A Tarente, des habitants et des ouvriers, menés par un "Comité de citoyens et travailleurs libres et conscients", se battent contre l’emploi, pour la fermeture de l’usine. Vous avez bien lu : ces gens pensent que leur vie vaut plus que l’emploi. Scandaleux, non ? Ce n’est pas à Là-bas si j’y suis, l’émission quotidienne du Front de Gauche sur France Inter, qu’on entendrait des syndiqués tenir des discours aussi révoltants.
Justement, ces ouvriers se battent aussi contre les syndicats. Quand leurs dirigeants nationaux sont venus à Tarente, cet été, le 2 août 2012, des ouvriers les ont hués, chassés, et ont pris la tribune. C’est que les syndicats se battent pour l’Ilva, pour l’usine et l’emploi, dont ces ouvriers ne veulent plus. Les syndicats se battent pour le salaire et, parfois, pour l’amélioration des conditions de travail des ouvriers. Non pour la disparition de la classe ouvrière. S’il y avait eu des syndicats d’esclaves, ils auraient combattu de toutes leurs forces l’abolition de l’esclavage. Or, la meilleure chose qui puisse arriver à la classe ouvrière, c’est de disparaître. Pour devenir quoi ?
A Tarente, certains pensent l’après-Ilva, les activités à venir, le gagne-pain, restaurer la vieille ville et les ruines grecques, retourner à la mer...
Dans le Manifeste du Parti communiste, Marx et Engels critiquent ces briseurs de machines qui attaquent "non seulement les rapports bourgeois de production", mais "les instruments mêmes de production" ; "ils anéantissent les marchandises étrangères en concurrence, ils cassent les machines, ils mettent le feu aux usines, ils cherchent à reconquérir la position périmée de l’ouvrier du Moyen-Age."
Il n’y a rien de plus périmé aujourd’hui que la société industrielle, dont les ravages menacent l’humanité jusque dans sa survie, sinon les souteneurs du parti industriel : libéraux ou communistes.
Nous n’avons d’autre avenir que sur la ruine de la société industrielle.
Nous, luddites et libertaires, nous sommes du côté de l’avenir.
Pièces et main d’oeuvre
(Pour lire le reportage de TomJo, cliquer sur l’icône ci-dessous.)
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