Voici quelques remarques d’Olivier Serre à propos de la « voiture intelligente » (sans conducteur) et du « débat éthique » soulevé par des universitaires, lequel se résume à : qui faut-il tuer en cas d’extrémité, les piétons sur la chaussée ou les passagers de la voiture ?

Posée ainsi, comme sujet de bac philo, et abondamment délayée par les médias, cette question permet d’en éliminer d’autres beaucoup plus pertinentes et de mettre le piéton humain, sur la chaussée ou dans la voiture, devant sa disparition prochaine. Pourquoi nous faudrait-il des voitures ? Quel est le bilan d’un siècle d’industrie automobile ? Pourquoi les machines devraient-elles être « intelligentes » ? Quelle est cette étrange « intelligence » qui semble fuir des hommes vers les machines ? Pourquoi le complexe scientifico-capitaliste s’acharne-t-il à éliminer la masse des hommes de toute activité, au profit de systèmes perfectionnés ?

Que ces brutes électroniques soient irrémédiablement stupides et serviles ne fait aucun doute. Elles fonctionnent, voilà tout. Le programme AlphaGo, créé par Google, ignore qu’il a battu le maître du jeu de Go ; il ne sait pas qu’il joue. Il ne sait pas plus qu’il existe qu’une pierre ou qu’une voiture qui écrase un homme. Les véritables écraseurs sont donc les concepteurs et les fabricants de machines à écraser les hommes, et c’est en vain qu’on chercherait un autre but à leur entreprise. Les machines « intelligentes » sont des cadres et des intermédiaires entre la technocratie dirigeante et la masse dirigée, en attendant son élimination.

Justement, et comme pour hâter cette relève du personnel humain par la machinerie « intelligente », on voit chuter de quatre points, entre 1999 et 2009, le quotient intellectuel (QI) moyen en France. (cf Le Monde, 21 juin 2016) Même déficit en Norvège, au Danemark, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Australie, en Suède, en Finlande. « Les trois fonctions cognitives testées (représentation des formes, arithmétique, raisonnement verbal) sont toutes en régression. »

Passons sur cette représentation quantifiée de l’intelligence, réductrice et morcelée, qui en dit plus long sur celle des scientifiques que sur celle des populations. Reste une énorme déperdition des « fonctions cognitives ». Eh quoi ! Vous ne pensiez tout de même pas que les épidémies de cancers et de stérilité seraient les seuls effets de l’empoisonnement chimique du milieu ? La pollution concourt aussi à l’abrutissement général, avec l’alimentation industrielle, l’addiction médiatique et la destruction des lieux de transmission (famille, école, sociétés). (cf. Le Cerveau endommagé, Barbara Demeneix. Editions Odile Jacob)

Mais rassurez-vous, votre « voiture intelligente » n’aura pas besoin de vous à bord pour aller faire un tour avec ses copines, vous pouvez disposer.
Quant à la technocratie, avec les modifications génétiques (déjà à l’œuvre en Chine), la reproduction artificielle de l’humain (déjà à l’œuvre partout) et ses diverses technologies d’« augmentation », elle compte bien sortir seule, et triomphante, du sabordage de l’espèce par elle organisé. (cf. Nature & Progrès n°108, été 2016 ; La reproduction artificielle de l’humain, A. Escudero. Ed. Le Monde à l’envers)

Olivier Serre, qui fut doctorant au CEA de Grenoble, est désormais aubergiste dans une vallée proche. Il a quelquefois écrit sur Pièces et main d’œuvre.