Nouvel état de nos critiques contre Biopolis et le techno-gratin.

La beauté du projet Biopolis c’est qu’il concentre tous les vices qui font du monde en général, et de cette ville en particulier, un endroit où la dégradation de la vie par les prédateurs du complexe techno-financier atteint le seuil critique, voire la phase terminale par épuisement des défenses immunitaires.

Et d’abord la sournoiserie et l’arbitraire qui entourent un projet politique, financé sur fonds publics (40,5 MF répartis entre la Métro, le Conseil Général et la Région Rhônes-Alpes) pour générer des bénéfices privés ("start-up" et rejetons des labos locaux). Cet arbitraire étant le vice qui permet tous les autres.

Ce n’est pas à la haute technocratie grenobloise (politiciens, fonctionnaires, industriels, scientifiques) de décider contre nous du développement local des nécro-technologies. Ce n’est pas aux Destot, Migaud, Micoud, Fellat-Pinet (Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie), Feuerstein (Président de l’Université Joseph Fourier et de l’Adebag), ni aux nécrophages du CHU, du Commissariat à l’Energie Atomique, du CRSSA (labo militaire, spécialisé dans les armes chimiques et bactériologiques) de décider localement du pillage du vivant (Exemples : transgénèse animale et végétale ; création d’un DESS "Biotech de Co" à l’Université PMF pour former les futurs requins du bio-commerce).

Seuls les citoyens en corps électoral - et non des représentants douteux, élus tous les cinq ans - ont compétence pour décider de Biopolis aussi bien que des questions d’énergie et de transport, qui sont de nature politique, et non technique, comme voudraient nous le faire croire les technocrates. Politiques, le nucléaire et SuperPhénix, les réacteurs de St Maurice l’Exil, du CEA et de l’Institut Laue Langevin. Politiques, les tunnels sous le Vercors, la Chartreuse, Belledonne, et le développement du désastre automobile. Politique, la chimie grenobloise avec ses 19 sites Seveso, créée pour produire des gaz de combat et pourvoyeuse de défoliant à l’armée américaine au Vietnam. Et bien sûr, politiques, les OGM, le piratage et le brevetage du vivant. Tout ce dont Biopolis, Minabio et nos bio-industries constituent la métastase locale. Politiques, parce que des activités de cette taille et de cette nature engagent l’ensemble des citoyens, et non la seule caste des techno-prédateurs.

Faut-il leur rappeler ? Tout citoyen est réputé compétent pour les affaires de la cité parce qu’il n’existe pas de science politique (d’épistémé de la polis), mais uniquement des opinions (doxa), ce qui constitue d’ailleurs le seul argument en faveur de la démocratie, de la soumission à la majorité.

Un citoyen, selon Aristote, c’est quelqu’un qui peut gouverner ou être gouverné. A Athènes, les magistrats étaient donc tirés au sort ou nommés à tour de rôle. Or depuis 2000 ans, la notion de citoyen s’est élargie (aux esclaves, aux femmes, bientôt aux métèques). C’est donc à nous tous, habitants de l’agglo, de nous prononcer au cas par cas, après débat contradictoire (et non après campagne de com’), sur des projets tels que Biopolis. Ou alors, il faut dire clairement que le droit de vote est réservé aux ingénieurs, techniciens, cadres. Aux "capacités" comme on disait sous la Restauration, au temps du suffrage censitaire. Et qu’on ne s’étonne pas de voir le simple citoyen voter avec ses pieds.

L’ obscurantisme et l’irrationnalisme techno de Biopolis constituent autant d’arguments rédhibitoires contre sa réalisation. A feuilleter le "Projet Biopolis" (document Adebag, UJF, Métro) ou la "Présentation du Projet Biopolis" (document Feuerstein, pages 6 et 7), on voit listés une cinquantaine de projets ou d’entreprises, la plupart dans les domaines de "l’ingénierie pour le vivant et la santé" et de la "bio-informatique et post-génomique fonctionnelle". C’est-à-dire de cette médecine high-tech toujours à la pointe de l’échec, pourvu qu’il rapporte gros ("à forte valeur ajoutée" comme dit Feuerstein, page 8). Une médecine dont la mode ces jours-ci est au tout-génétique (gènes de l’obésité, du cancer, de la schizophrénie, de l’alcoolisme, de l’autisme, etc), mais qui fait son beurre dans les chimiothérapies aussi bien que dans la fameuse recherche du "vaccin anti-cancer", sans jamais voir que ces maux sont d’abord des "maux de civilisation". Que les obèses sont d’abord des pauvres gavés de fast-food (au prion ?), et que les causes de la prolifération des cancers gisent dans l’air et dans la chaîne alimentaire. Bref dans la dégradation par cette même techno-industrie de notre environnement (cf L’Ecologiste n°1, automne 2000). Cependant les véritables maladies génétiques restent "orphelines" parce que leurs victimes ne sont pas assez nombreuses pour constituer un marché rentable. Comme peuvent crever les victimes africaines du sida parce que les charognards des labos pharmaceutiques interdisent la production de médicaments génériques qui réduirait la rentabilité de leurs brevets.

Biopolis et Cie, c’est la représentation locale de cette médecine qui, pour la première fois dans l’histoire, ose breveter le vivant, s’approprier une découverte plutôt qu’une invention (ce qui constituait déjà une belle mesquinerie marchande.) A la façon de ces conquérants qui, ayant découvert le Pérou et massacré ses habitants, s’en emparent comme s’ils l’avaient inventé. C’est la médecine à la docteur Knock pour qui tous les bien-portants sont des malades qui s’ignorent, puisque ayant tous des gènes qui les disposent à telle ou telle affection. C’est une médecine bornée, qui s’attaque toujours à l’agent du mal plutôt qu’à sa cause - au bacille de Koch plutôt qu’à l’aggravation de la misère pour combattre la tuberculose.

Faut-il leur rappeler à ces Diafoirus high-tech : "le microbe n’est rien, le terrain est tout" (Pasteur). Mais qu’importe, puisque les plus riches de leurs patients pourront toujours se payer leurs traitements de luxe, non remboursés par la Sécurité Sociale. Leur "industrie du vivant et de la santé" est en réalité une industrie de la mort et de la maladie ; et leur "biotechnologie" désigne par antiphrase ce qui n’est en fait que nécro-technologie : sciences de la mort, des OGM et du fameux Terminator, des pesticides, des herbicides, des fongicides, des bactéricides et somme toute de l’homicide.

Il est donc bien normal de voir le CRSSA ( Centre de Recherche du Service de Santé des Armées : 24 avenue des Maquis du Grésivaudan, 38700 La Tronche. Tél : 04 76 63 69 00 -www.defense.gouv.fr/sante) participer à l’Adebag et au projet Biopolis. Ayant longtemps conservé une grande discrétion locale, ce labo militaire profite du dispositif Biotox pour s’offrir une opération de communication. Spécialisé dans les armes NBC (nucléaires, biologiques et chimiques), le CRSSA ne se contente pas d’ouvrir du courrier suspect. Il étudie depuis des années les radiations ionisantes, les virus, les gaz toxiques, la résistance au combat (froid, chaleur, sommeil, altitude) - pour nous protéger disent ses responsables (cf Le Daubé du 12 octobre 2001). Ce qui n’est qu’un demi-mensonge dans un domaine où les mêmes études servent à fabriquer le poison et le remède, le virus et le vaccin, l’épée et le bouclier. La crédibilité du CRSSA, elle se mesure à cette opinion du Dr Alain Jouan, l’un de ses biologistes, lors d’un débat l’an dernier au café "Science et Guerre" de Lyon : "Il existe une barrière morale chez tout être humain et l’utilisation de l’arme biologique dépasse cette barrière : c’est pourquoi un acte terroriste de cette ampleur n’a jamais existé." (cf Mille et Une Science : www.1001-sciences.org).

Irréfutable, Docteur Jouan. D’après Simple Citoyen, il existe une barrière morale chez tout scientifique et l’étude des moyens de destruction massive dépasse cette barrière : c’est pourquoi, d’après lui, une infamie de cette ampleur n’a jamais existé. Aussi Simple Citoyen se sent-il parfaitement rassuré lorsque Claude Feuerstein l’informe de l’existence d’un comité bioéthique au sein de Biopolis. "Mission : mener une réflexion locale sur les aspects bio-éthiques en relation avec les projets développés sur le site (...)"

En effet. Réfléchissons.

Et nul doute que les élus de la Métro ne réfléchissent avant de financer la création d’une Société Anonyme de droit privé par l’Université Joseph Fourier, pour "valoriser" les mirobolantes retombées de Biopolis.

Nul doute qu’ils ne renoncent à implanter un site aussi douteux en zone inondable, alors que la crue de l’Isère des 15-16 octobre 2000 a non seulement noyé une fois de plus le quai Charpenay à La Tronche, mais emporté une tranche du quai Jongkind.
Nul doute qu’ils ne financent plutôt la réfection des digues en amont de l’agglo, dont le coût s’élève par une merveilleuse coïncidence à 45 MF (cf doc de l’Association Syndicale Drac Isère).

Nul doute que tous ceux qui interviennent dans la vie publique locale, à titre civique, politique, médiatique, écologique et tic et tic, ne se mobilisent pour l’annulation du projet Biopolis et la fermeture de l’arsenal du CRSSA.

Puisque la vie est l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort (Bichat) : Résistons.